Doriens
Un mythe grec, constitué à une époque relativement tardive, faisait du couple de Deucalion et Pyrrha, échappé à un déluge, les parents d'Hellen qui eut lui-même trois fils, Xouthos, Eolos et Doros ; le premier était l'ancêtre des Ioniens, le second des Éoliens, le troisième des Doriens.
Cette généalogie rend compte de la situation linguistique de la Grèce classique, où les trois principaux dialectes helléniques étaient l'ionien, l'éolien et le dorien.
Ce dernier était parlé dans tout le sud et l'est du Péloponnèse, l'Acamanie, la Crète et la Doride, groupe d'îles situées au sud-ouest de l'actuelle Turquie, Rhodes étant la principale.
Certains caractères propres aux Doriens se retrouvent dans leur art : simplicité, rigueur, sévérité.
Cela apparaît dans le style architectural qtft porte teur nom, le dorique, mais qui fut cependant utilisé avec la plus grande habileté par des populations non doriennes comme les Athéniens ou les Grecs de Paestum, ou dans la sculpture archaïque (v. kouros), où les écoles doriennes s'opposent au style des ateliers ioniens.
En Grèce continentale, les deux villes doriennes dominantes ont été Sparte et Argos.
Le problème de l'origine des Doriens et de leur rôle dans la fin de la civilisation mycénienne demeure encore discuté.
Selon les historiens grecs ils seraient les derniers arrivés des peuples qui occupèrent la Grèce méridionale ; d'après Thucydide ils auraient envahi le Péloponnèse 80 ans après la prise de Troie, située par les Grecs aux alentours de ~ 1200.
Hérodote, qui les fait émigrer de Phtiotide au pied de l'Ossa et de l'Olympe (en Thessalie), puis en Dryopide vers le Pinde et enfin dans le Péloponnèse, assure que c'est seulement dans cette dernière contrée qu'ils prirent le nom de Doriens.
Par ailleurs les Grecs assimilaient cette migration à ce qu'ils appelaient le "retour des Héra-clides", c'est-à-dire le retour dans le Péloponnèse des descendants d'Héraclès, héros des Doriens par excellence.
Sur la foi de ces données, on a jusqu'à une époque récente, attribué aux Doriens la destruction des palais de la Grèce mycénienne et de la civilisation dont ils étaient les centres, la supériorité de ces envahisseurs étant due à leurs armes en fer.
Cette opinion a dû être, sinon abandonnée quoi qu'en disent certains auteurs, tout au moins amendée.
Le fait que ces envahisseurs parlaient une langue fort proche de celle des Mycéniens empêchait de les rattacher aux tribus barbares descendues des régions balkaniques plusieurs siècles après l'arrivée des premières bandes d'Acheens.
C'est d'ailleurs en se basant sur l'étude des isoglosses que James Hooker a soutenu que les Doriens appartenaient au monde mycénien et qu'en réalité leur "invasion" n'était jamais qu'une révolte des anciennes populations contre l'aristocratie mycénienne ; thèse qui, malgré l'habileté de l'argumentation de l'auteur, présente trop de faiblesses pour pouvoir être retenue.
Il semble bien que les Doriens, qui à l'époque historique étaient répartis en trois tribus (ce qui serait inexplicable s'ils étaient constitués par un ensemble hétéroclite de déshérités du monde mycénien), l'étaient déjà à l'époque préhellénique ; ils vivaient alors dans des régions excentriques de la Grèce, mais qui en faisaient tout de même partie : l'Épire, ou la Thessalie, d'où ils seraient descendus vers la région appelée par la suite Doride, située en Grèce centrale, entre l'Oeta et le Parnasse.
Et c'est de cette dernière région, où ils auraient pu rester quelque temps en contacts étroits avec les royaumes mycéniens, qu'ils seraient partis pour occuper le Péloponnèse au ~ XIIe siècle.Il semble cependant qu'on ne puisse leur imputer la destruction des palais mycéniens dans leur ensemble, puisque, d'une part, ceux-ci ont été détruits à des époques différentes, et d'autre part, les sites ont connu ensuite des destins dissemblables : Pylos n'a pas été réoccupé, contrairement à Thèbes et Orcho-mène, tandis que Mycènes et Tiryn-the ont été détruites à trois reprises.
La fin de la période mycénienne et le passage au Géométrique sont marqués par l'apparition d'un matériel archéologique nouveau, d'origine généralement balkanique, dont on ne peut dire que les Doriens soient les porteurs, ce qui impliquerait d'autres vagues d'invasion non mentionnées par les auteurs anciens, ou des relations commerciales plus étroites qu'on pourrait le supposer à une époque de troubles.
Les principales innovations sont : l'épée de bronze dite de Naue II (Griffzungenschwert de la terminologie allemande) dont l'origine doit se trouver vers le moyen Danube ; la dague à poignée à ailerons dite de "Pes-chiera" ; les longues têtes de flèche à douille ; le couteau en bronze à lame courbe ; la fibule en archet ; la hache à tourillon (Armchenbeil) ; la tombe à ciste; l'incinération des corps.
Il convient de remarquer que certaines de ces nouveautés ne sont pas totalement originales, telle la tombe à ciste qu'on rencontre dans la Grèce de PHelladi-que, tandis que l'incinération ne se généralise qu'un peu plus tard, sans doute sous l'influence des coutumes balkaniques.
D'un autre côté, le fer n'est guère représenté dans ces innovations et ce n'est qu'un peu plus tard que se vulgariseront les armes de fer, dont l'origine doit se situer en Asie Mineure.
Aussi, s'il est possible que certains de ces éléments aient été introduits par les Doriens, il en est d'autres qui leur sont manifestement étrangers, telle l'épée de Naue II répandue dans le monde méditerranéen^ dès la fin du ~ xine siècle.jusqu'en Egypte.
Il n'en demeure pas moins que l'établissement de ces populations qui se disaient elles-mêmes doriennes, dans le monde grec, va modifier les anciennes données et renouveler les formes de la civilisation hellénique dont elles seront l'une des composantes.

Les six villes de la confédération de la Doride étaient : Cos, Cnide, Hali-carnasse, et trois villes de l'île de Rhodes, Ialysos, Lindos et Camiros.

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